1 octobre 2025
Mastectomie : éviter l’anesthésie générale
L’anesthésie régionale sous blocs paravertébraux est une procédure innovante permettant aux femmes devant subir une mastectomie d’éviter les désagréments liés à l’anesthésie générale, et de réintégrer une vie active plus rapidement.

Chaque année, le cancer du sein contraint des centaines de Québécoises à subir une mastectomie. Cette chirurgie est généralement pratiquée sous anesthésie générale, laquelle provoque de nombreux inconvénients pour les patientes. La Dre Ariane Clairoux, anesthésiologiste à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR) et chercheuse au Centre de recherche HMR, a développé une technique d’anesthésie innovante et sécuritaire qui comporte moins de nuisances pour les femmes et facilite leur retour à une vie active.
Une vieille technique renouvelée
L’anesthésie régionale sous blocs paravertébraux consiste à anesthésier une partie du corps de la patiente en ciblant des nerfs sensitifs et moteurs précis afin d’empêcher le message de douleur de se rendre cerveau. Alors que l’anesthésie locale contribue à « geler » une petite parcelle du corps (par exemple, la gencive lors de soins dentaires), l’anesthésie régionale, elle, entraîne l’insensibilisation d’une plus grande région, permettant des chirurgies plus complexes.
Bien que l’anesthésie régionale existe depuis plusieurs années, elle restait peu utilisée pour les mastectomies. « Les instruments médicaux n’étant pas aussi perfectionnés qu’aujourd’hui, cette technique comportait une part de risques importante, explique la Dre Clairoux qui a effectué une année de surspécialité en anesthésie régionale en 2016. Ça prenait donc des anesthésiologistes très aguerris à cette méthode, et il y en avait peu. On recourait donc d’emblée à l’anesthésie générale, à quelques exceptions près. »
Récemment, les avancées technologiques ont rendu la procédure plus conviviale. Mais, surtout, il y a eu la COVID…
Une pandémie qui change tout
L’avènement de la COVID-19 force la mise en place de mesures sécuritaires extrêmes. Par conséquent, le temps passé en salle d’opération pour une mastectomie bondit d’environ 45 minutes afin de purifier la salle des aérosols libérés lors de l’anesthésie générale.
Un matin, la Dre Clairoux et son collègue chirurgien consultent la liste des patientes à opérer durant la journée. Constat immédiat : trop de cas pour le temps imparti. « C’est à ce moment que j’ai proposé à mon équipe de recourir à l’anesthésie régionale sous blocs paravertébraux », se remémore-t-elle.
La durée des chirurgies diminue alors considérablement et le nombre de patientes traitées passe du simple au double, voire au triple. Qui plus est, les femmes expriment une vive satisfaction devant l’absence d’effets secondaires et leur retour rapide à la maison. Fait inespéré : on parvient même, en quelques mois, à éliminer la liste d’attente, ce qui ne s’était jamais vu.
Faciliter le retour à la vie active des patientes
Depuis sa mise en place en 2020, l’anesthésie régionale sous blocs paravertébraux a permis de traiter plus de 500 patientes par année à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont. « Les femmes entendent parler de cette procédure et nombreuses sont celles qui la demandent, dit la Dre Clairoux. On a donc réaménagé nos installations et réorganisé nos façons de faire en salle d’opération. Tous les professionnels ont mis la main àla pâte ».
Et pour cause : les patientes anesthésiées régionalement ne rapportent que peu ou pas de douleurs et de nausées, et sont en mesure de réintégrer promptement leur vie active. « Plusieurs de mes patientes sont des jeunes mères qui travaillent, souligne la spécialiste. Elles expriment souvent le souhait de reprendre rapidement leur quotidien auprès de leur famille. C’est important, et également valorisant, de pouvoir leur offrir cette possibilité. »
Les avantages se font aussi sentir sur le réseau. L’allégement de l’intervention et le fait que les femmes quittent l’hôpital après quelques heures — sans même passer par la salle de réveil — réduisent la pression sur les ressources, écourtent les listes d’attente et génèrent des économies substantielles.
En déploiement dans plusieurs centres hospitaliers à travers la province, l’innovation de la Dre Clairoux semble promise à un bel avenir. « La précision accrue des appareils échographiques facilite l’apprentissage de la technique, conclut Dre Ariane Clairoux. Plusieurs médecins et résidents sont présentement en formation, et on travaille à étendre cette procédure à d’autres types de chirurgies. Il y a là une belle occasion d’améliorer les soins, leur accès, et de désengorger notre réseau. »
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